Article rédigé par le Ouatee Maxime Kerdraon

Poésie sur la ligne R

Avec le printemps, beaucoup ont ce petit râle dans la gorge, ce petit maux qui pousse à alitérer en R, ces petits mots qui semblent surgis d’une autre ère. Allergologues et autres spécialistes vous diront par erreur que la saison des pollens éreinte.

Erratum ! Les symptômes s’éterniseront.

Ne vous faites pas de mauvais sang. Ne vous mettez pas la rate au court-bouillon. Le remède réside à moins de cent kilomètres.
Votre volonté irrésistible, irrépressible de prendre rapidement la ligne R pour un périple ferroviaire de proximité se trouve être la raison toute désignée de cette perturbation récurrente.

Le changement d’heure vous rappelle que vous n’êtes pas du matin. Cheminement erratique jusqu’à Gare de Lyon. Vous avez pris le 8:12 direction Fontainebleau. Vous auriez pu prendre le 9:12 mais l’effort de vous réveiller plus tôt revêtait un réel ramdam pour votre sommeil que vous associez aux vrais voyageurs.

L’arrêt visé n’apparaît pas directement dans les horaires. Sans doute encore caché par des feuilles, il émergera de la forêt le temps voulu. Le café emporté, le râle de gorge s’atténue, la chaleur parcoure vos jambes. Vous montez dans la ligne R.
Dans la voiture de tête : l’arrêt visé ne permet pas l’ouverture de toutes les portes du train. Enfin vous le matérialisez. « Fontainebleau forêt » s’affiche à l’intérieur de la voiture dans les arrêts desservis. Vous vous savez chanceux, il ne se dévoile que rarement, le weekend, deux fois le matin et dans un sens. Ses apparitions semblent être de plus en plus connues.

Quelques vététistes, escaladeurs et randonneurs ont également eu ce petit râle dans la gorge. 50 minutes plus tard le train s’arrête entre Bois-le-Roi et Fontainebleau-Avon. Une butte de terre en guise de quai, on est bien dans l’économie et l’écologie de la forêt.

Des touristes chinois avec leur valises descendent, observent et remontent en vitesse. A vitesse grand V, ils ne sont pas encore dans le thème du R. Biais culturel. Rires rassérénants.

Pour vous, point de train retour, il faudra marcher jusqu’à la prochaine gare. Le café vous a échauffé, vos mots de gorge s’estompent, air frais et ligne R.

Vous ne râlez plus.